Nous aspirons à la paix, c’est pourquoi nous nous lançons dans de féroces batailles et d’immondes guerres pour asseoir sur le siège de notre rédemption le pire de nous-mêmes. Nous n’avons pas assez de larmes pour laver les détritus dont nous recouvrons notre mère. La Terre est à l’image de notre âme, un dépotoir de paradoxes et de culpabilités. Nous essayons vainement de démontrer que nous sommes dignes de notre appartenance à l’espèce dominante de ce monde en ruine mais chaque mot et chaque geste ne sont que la démonstration de notre hypocrisie, de notre égoïsme, de notre lâcheté, de notre bestialité.
Quelle magnificence de contempler tous ces repentis se frapper la poitrine en signe de pénitence pour les infamies commises contre leur volonté. Comment ne pas vouloir participer à ce recueillement collectif, à cette écoute tardive de ceux dont les souffrances sont indescriptibles. Tous ces tourments dont on se moque. Ils n’ont aucune importance si ce n’est celle de se donner bonne conscience et de paraître tenir compte de son prochain.
Dans l’absolu, ces morts ne nous sont rien. On daigne se fendre d’un sourire compatissant aux rescapés qui nous livrent leurs dernières gouttes de salive espérant que leurs cicatrices et leurs traumatismes nous guideront sur le bon chemin. En réalité, dans le parallélisme des vérités, on discute de lopin de terre à envahir, de guerre pour un morceau de chiffon, de génocide pour un barrage, d’ethnocide pour de l’électricité, de haine pour notre voisin qui a un salaire plus conséquent, de trahison pour ceux qui ne veulent pas se plier à la tyrannie des courants de pensée de repli, de renoncement, de violence.
Les bêtes féroces s’imposent aux chiens dressés et soumis. Leurs dents usées ne mordent plus. Ils ont oublié d’enseigner à leur progéniture à se défendre. Alors, cette dernière ne sait qu’aboyer, se rouler dans la fange, s’autodétruire pour finalement s’agenouiller devant ceux qui avaient été combattus par ces pauvres bougres qui leur avaient offert non seulement leur dernière goutte de salive mais aussi leur dernière goutte de sang. Quelle importance ? Ils rient, ils dansent, ils haussent les épaulent. Les mauvais contes et les diables n’existent que pour les fous et les pessimistes. Mais ce sont eux, les fous, qui rendront vivants contes et diables.
Magy Craft